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Confiscation : la cour d’assises doit indiquer la nature et l’origine des objets concernés

Pénal - Procédure pénale
17/12/2020
Dans un arrêt du 16 décembre 2020, la Cour de cassation censure un arrêt d’une cour d’assises qui n’a pas indiqué la nature et l’origine des objets placés sous scellés dont elle a ordonné la confiscation, ni le fondement de cette peine. La cour d’assises ne permet donc pas à la Cour de cassation de contrôler la légalité de sa décision.
La cour d’assises condamne un homme à 8 ans d’emprisonnement et ordonne une mesure de confiscation. L’accusé relève appel de l’arrêt pénal et le ministère public forme appel incident. La partie civile, elle, relève appel de l’arrêt civil. La cour confirme la culpabilité, condamne l’intéressé à une peine d’emprisonnement et ordonne la confiscation des scellés.
 
Après un pourvoi formé par l’accusé, la Haute juridiction a cassé et annulé l’arrêt en ses seules dispositions relatives à la confiscation des scellés et l’arrêt civil.
 
En effet, l’intéressé critique l’arrêt en ce qu’il a ordonné la confiscation des scellés, sans motiver sa décision et sans constater que les biens confisqués constituaient le produit ou l’objet de l’infraction.
 
La Cour de cassation, dans un arrêt du 16 décembre 2020, rappelle donc que :
  • l’article 131-21 du Code pénal prévoit que « la confiscation est encourue de plein droit pour les crimes et porte sur tous les biens ayant servi à le commettre, ainsi que sur ceux qui en sont l’objet, ou le produit direct ou indirect » ;
  • l’article 365-1 du Code de procédure pénale dispose que la motivation consiste dans l’énoncé des principaux éléments ayant convaincu la cour d’assises dans le choix de la peine, « la motivation de la peine de la confiscation du produit ou de l’objet de l’infraction n’étant pas nécessaire ».
 
Donc, si la cour d’assises n’a pas à préciser les raisons qui la conduisent à ordonner la confiscation du produit ou objet de l’infraction, elle doit néanmoins énumérer les objets confisqués et indiquer s’ils constituent l’instrument, le produit ou l’objet de l’infraction « afin de mettre la Cour de cassation en mesure de s’assurer de la légalité de sa décision, et d’apprécier, le cas échéant, son caractère proportionné ».
 
La Haute juridiction en conclut qu' « En prononçant ainsi, sans indiquer la nature et l’origine des objets placés sous scellés dont elle a ordonné la confiscation, ni le fondement de cette peine, la cour d’assises n’a pas mis la Cour de cassation en mesure de contrôler la légalité de sa décision ».
 
En matière correctionnelle, la Cour de cassation a déjà rappelé la nécessité pour le juge, en matière correctionnelle, de motiver sa décision au regard des circonstances de l’infraction. Elle avait affirmé qu’il incombe au juge qui décide de confisquer un bien, après s'être assuré de son caractère confiscable en application des conditions légales, de préciser la nature et l'origine de ce bien ainsi que le fondement de la mesure. Elle doit également, le cas échéant, s'expliquer sur la nécessité et la proportionnalité de l'atteinte portée au droit de propriété du prévenu (Cass. crim., 27 juin 2018, n° 16-87.009, v. Peine de confiscation : la Cour de cassation précise ses exigences relatives à la motivation, Actualités du droit, 11 juill. 2018).
 
 
Une augmentation des D&I ?
Aussi, l’arrêt civil est attaqué en ce qu’il a déclaré irrecevable l’appel de la partie civile contre la décision civile rendue par la cour d’assises, statuant en première instance. La Haute juridiction souligne alors que l’article 380-6 du Code de procédure pénale dispose que « la cour d’assises, statuant en appel sur l’action civile, ne peut, sur le seul appel de l’accusé, du civilement responsable ou de la partie civile, aggraver le sort de l’appelant. La partie civile ne peut, en cause d’appel, former aucune demande nouvelle ; toutefois, elle peut demander une augmentation des dommages et intérêts pour le préjudice souffert depuis la précédente décision ».
 
Concrètement, la victime, constituée partie civile en première instance non appelante, peut demander une augmentation des dommages et intérêts pour le préjudice subi depuis la première décision. Néanmoins, l’arrêt de la cour d’assises statuant en appel accordant des dommages et intérêts sans préciser qu’ils réparent un préjudice souffert depuis la décision de première instance encourt la cassation.
 
 
Dans le même arrêt du 16 décembre 2020, la Cour de cassation rappelle que le principe selon lequel « nul n’est tenu de s’accuser lui-même » interdit de déduire la culpabilité de l’accusé de son silence et de le contraindre à faire des déclarations « mais ne s’oppose pas à ce que, après avoir retenu sa culpabilité, le juge tienne compte, entre autres éléments, pour déterminer la peine, de la manière dont l’accusé se situe par rapport aux faits, afin d’apprécier sa dangerosité, le risque de récidive et les garanties de sa réinsertion ».
 
 
 
Source : Actualités du droit