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Inconstitutionnalité partielle du mécanisme de transaction par OPJ

Pénal - Procédure pénale
23/09/2016
Le Conseil constitutionnel, saisi d'une QPC, sur la constitutionnalité de la transaction par OPJ.
Le Conseil constitutionnel a été saisi le 29 juin 2016, par le Conseil d’État (CE, 27 juin 2016, n° 395321), d’une question prioritaire de constitutionnalité posée pour le Syndicat de la magistrature et le Syndicat des avocats de France, relative à la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit de l’article 41-1-1 du Code de procédure pénale (et de l’article L. 132-10-1 du Code de la sécurité intérieure), dans sa rédaction issue de la loi du 15 août 2014 relative à l’individualisation des peines et renforçant l’efficacité des sanctions pénales (L. 15 août 2014, n° 2014-896, JO 17 août, art. 35).
 
Les syndicats requérants soutenaient que ces dispositions méconnaissent le droit à un procès équitable et les droits de la défense garantis par l’article 16 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789, ainsi que le droit au respect de la présomption d’innocence reconnu par l’article 9 de cette Déclaration. Ils soutenaient également que ces dispositions portent atteinte à l’article 34 de la Constitution et au principe de « légalité procédurale » qui découlerait des articles 8 et 9 de la Déclaration de 1789.

 
  • Grief tiré de la méconnaissance des exigences résultant de l’article 16 de la Déclaration de 1789


Le Conseil constitutionnel estime, en premier lieu, que contrairement à ce que soutiennent les syndicats requérants, les dispositions relatives à la consignation d’une somme d’argent en vue de garantir le paiement de l’amende transactionnelle ne confèrent pas à cette dernière un caractère exécutoire, puisque l’auteur de l’infraction peut toujours, même après l’homologation, refuser d’acquitter la somme due.
La circonstance que le décret pris en application des dispositions contestées aurait conféré un tel caractère exécutoire à la mesure transactionnelle en prévoyant que la consignation valait paiement, une fois la transaction homologuée, ne saurait à cet égard être prise en compte, dans l’exercice de son contrôle, par le Conseil constitutionnel.

Il considère ensuite, en second lieu, pour que les droits de la défense soient assurés dans le cadre d’une procédure de transaction ayant pour objet l’extinction de l’action publique, la procédure de transaction doit reposer sur l’accord libre et non équivoque, avec l’assistance éventuelle de son avocat, de la personne à laquelle la transaction est proposée.

Le Conseil constitutionnel émet donc une réserve de constitutionnalité : les dispositions contestées ne sauraient, sans méconnaître les droits de la défense, autoriser qu’une transaction soit conclue sans que la personne suspectée d’avoir commis une infraction ait été informée de son droit à être assistée de son avocat avant d’accepter la proposition qui lui est faite, y compris si celle-ci intervient pendant qu’elle est placée en garde- à-vue.

 
  • Grief tiré de la méconnaissance de la présomption d’innocence


Le Conseil constitutionnel rejette l’argumentation proposée : ni le principe selon lequel nul n’est tenu de s’accuser, qui découle de l’article 9 de la Déclaration de 1789, ni aucune autre exigence constitutionnelle ne fait obstacle à ce qu’une personne suspectée d’avoir commis une infraction reconnaisse librement sa culpabilité et consente à exécuter une peine, s’acquitter d’une amende transactionnelle ou exécuter des mesures de nature à faire cesser l’infraction ou à en réparer les conséquences.

Par conséquent, les dispositions contestées ne méconnaissent pas la présomption d’innocence.

 
  • Grief tiré de la méconnaissance de sa compétence par le législateur


Le Conseil constitutionnel censure le dispositif existant.

Il estime en effet que le 4° du paragraphe I de l’article 41-1-1 du Code de procédure pénale, en prévoyant qu’un décret fixe la valeur de l’objet volé en-deçà de laquelle il est possible de proposer à l’auteur d’un vol une transaction pénale (CPP, art. R. 53-33-37-3, créé par D. n° 2015-1272, 13 cot. 2015, JO 15 oct.) , renvoie au pouvoir réglementaire le soin de délimiter le champ d’application d’une procédure ayant pour objet l’extinction de l’action publique.

Ce faisant, le législateur a méconnu sa compétence dans des conditions affectant l’égalité devant la procédure pénale. Le 4° du paragraphe I de l’article 41-1-1 du Code de procédure pénale doit donc être déclaré contraire à la Constitution.
 
Source : Actualités du droit