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Possibilité de demander au juge de l'extradition de reconnaître le bénéfice de la protection subsidiaire

Public - Droit public général
Pénal - Procédure pénale
08/02/2017
Un étranger faisant l'objet d'un décret d'extradition peut faire valoir devant le juge de l'extradition que les risques qu'il encourt en cas de retour dans son pays sont de nature à lui accorder le bénéfice de la protection subsidiaire et à faire obstacle à sa remise aux autorités de ce pays dans le cadre de la procédure d'extradition. Telle est la solution adoptée par le Conseil d'Etat dans une décision du 30 janvier 2017.
 
En l'espèce, par décret du 31 juillet 2015, le Premier ministre a accordé aux autorités albanaises l'extradition de M. B., ressortissant albanais, sur le fondement d'une décision de placement en détention provisoire prononcée le 10 septembre 2013 par le tribunal de Kurbin, aux fins de poursuites de faits qualifiés d'assassinat en d'autres circonstances qualifiantes et fabrication et détention non autorisées d'armes militaires et de munitions. M. B. demande au Conseil d'Etat son annulation pour excès de pouvoir.

Les Sages notent, d'abord, que le décret attaqué satisfait à l'exigence de motivation. Ils rappellent, ensuite, que si une extradition présentée en vue de permettre la poursuite d'infractions pénales ne peut être légalement accordée, lorsqu'une condamnation est intervenue à raison de ces infractions, qu'au vu d'une nouvelle demande de l'Etat requérant tendant à l'exécution de la peine et conforme aux stipulations conventionnelles et aux dispositions législatives applicables à la situation résultant de cette condamnation et après examen de cette nouvelle demande par la chambre de l'instruction de la cour d'appel compétente, cette règle ne s'applique que lorsque la condamnation prononcée est exécutoire. Or, à la date du décret attaqué, aucune condamnation exécutoire n'avait été prononcée à l'encontre de l'intéressé. Il n'était, par conséquent, pas fondé à soutenir que l'extradition demandée aux fins de poursuites ne pouvait être légalement accordée.

Le Conseil énonce, aussi, que les moyens tirés de ce que le Premier ministre aurait commis une erreur manifeste au regard des exigences résultant des réserves émises par la France à la ratification de la Convention européenne d'extradition ou aurait méconnu les articles 2, 3 et 6 de la Concention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme (CESDH) ne peuvent qu'être écartés.

Enfin, selon le Conseil, il ne ressort pas des éléments du dossier que le bénéfice de la protection subsidiaire prévue par les dispositions des articles L. 712-1 et suivants du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile aurait été accordé à M. A. ni que les risques de vengeance, que l'intéressé fait valoir en cas de retour en Albanie, soient de nature à lui accorder le bénéfice de cette protection et à faire obstacle à sa remise aux autorités albanaises dans le cadre de la procédure d'extradition.
 

Par Marie Le Guerroué
 
Source : Actualités du droit