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Perquisition réalisée sans mandat : la Belgique condamnée pour violation du droit au respect du domicile

Pénal - Procédure pénale
08/02/2017
Il y a violation de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales (droit au respect de la vie privée et familiale) dès lors qu'une perquisition a lieu sans mandat de perquisition, alors que le Code d'instruction criminelle belge prévoit qu'une perquisition ne peut être effectuée par un officier de police judiciaire que si celui-ci dispose d'un mandat exprès du juge d'instruction. Tel est le principal apport d'un arrêt rendu par la Cour européenne des droits de l'Homme, le 31 janvier 2017.
 
Dans cette affaire, le juge d'instruction du tribunal de première instance de Bruxelles délivra un mandat de perquisition concernant une habitation située à Molenbeek-Saint-Jean où résidait M. J.. Ce dernier était suspecté de faire partie d'une organisation criminelle et de pratiquer la traite d'êtres humains. Mme K., qui vivait dans un appartement situé au deuxième étage du même bâtiment que M. J., fit l'objet d'un contrôle d'identité de la part des policiers, qui, constatant que le nom de l'intéressée se trouvait dans le dossier pénal, décidèrent de leur propre chef de procéder à la perquisition de son appartement. Le même jour, elle fut privée de sa liberté et le juge d'instruction procéda à sa mise en accusation pour participation à une organisation criminelle et pour avoir usé de manœuvres frauduleuses pour faire entrer et séjourner un étranger dans le pays. En décembre 2005, Mme K. excipa, devant la chambre du conseil, de la nullité de tous les actes d'instruction, invoquant l'illégalité de la perquisition effectuée sans mandat, mais sa demande fut rejetée.

La chambre des mises en accusation de la cour d'appel de Bruxelles, saisie sur renvoi après cassation, constata l'irrégularité de la perquisition, estimant cependant que l'irrégularité n'était pas prescrite à peine de nullité par la loi et qu'elle n'entachait pas la fiabilité des preuves ainsi recueillies. Mme K. fut déclarée coupable des faits reprochés et condamnée à une peine d'emprisonnement de cinq ans, ainsi qu'à une amende de 10 000 euros. Le tribunal correctionnel de Bruxelles considéra également qu'il n'y avait pas lieu d'exclure les éléments de preuve obtenus lors de la perquisition, et indiqua que l'intéressée pouvait introduire une action en réparation contre l'Etat sur le fondement de l'article 1382 du Code civil belge. Ce jugement fut confirmé en appel et le pourvoi en cassation de Mme K. fut rejeté. Invoquant notamment l'article 6 § 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales (CESDH), Mme K. a argué de l'illégalité de la perquisition menée à son domicile.

Après avoir énoncé le principe susvisé, la Cour européenne retient la violation de l'article 8 de la CESDH.

V. également CEDH, 25 févr. 1993, Aff. 82/1991/334/407, Funke c/ France, où il est rappelé que les exceptions prévues au paragraphe 2 de l'article 8 doivent être interprétées de manière restrictive.

 
Par Aziber Seïd Algadi


 
Source : Actualités du droit