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Règlementation économique et rétroactivité des lois pénales plus douces

Affaires - Pénal des affaires
Transport - Douane
01/12/2016
Le principe de la rétroactivité de la loi pénale plus douce disparait-il en présence d’une réglementation économique ? Telle est la question préjudicielle posée à la CJUE par la Cour de cassation dans une décision du 23 novembre 2016.
Pour échapper à une condamnation, un opérateur invoque l’applicabilité d’une loi pénale plus douce avec succès : les juges du fond le relaxent en ne retenant pas contre lui les fausses déclarations ayant pour but ou pour effet d'obtenir, en tout ou partie, un remboursement, une exonération, un droit réduit ou un avantage quelconque attaché à l'importation ou à l'exportation du 4° de l’article 426 du Code des douanes. En l’espèce, il a obtenu des restitutions à l’exportation pour des morceaux de bœuf qui ne pouvaient en bénéficier en raison d’un premier règlement communautaire, mais qui, postérieurement aux faits, en bénéficiaient à la suite d’une modification opérée par un second règlement communautaire.
 

Arrivée en cassation, la question concerne la portée du principe d'application immédiate de la loi pénale plus douce (consacré à l'article 49 de la Charte des droits fondamentaux), face à une réglementation économique. En effet, pour la Cour de cassation, ce principe découle notamment de l'idée selon laquelle les incriminations et les peines ne peuvent être édictées que si elles apparaissent nécessaires. Mais l'appréciation de cette justification revêt, selon la Cour, « un caractère particulier en matière de réglementation économique, par nature changeante » : dans ce domaine, la circonstance qu'une mesure n'apparaît plus nécessaire au regard de la situation économique actuelle n'implique pas qu'elle ne l'ait pas été lorsqu'elle a été adoptée et que sa méconnaissance ne doive plus être sanctionnée.
 

Par ailleurs, la Cour précise que le principe selon lequel il est nécessaire de sanctionner les personnes qui, grâce à de fausses déclarations ou à des manœuvres, obtiennent des restitutions à l'exportation auxquelles elles n'avaient pas droit découle de l'article 4. 3 du Traité sur l'Union européenne et que le point 4 de l’article 426 précité, qui contribue à mettre en œuvre ce principe au plan interne et qui constitue le fondement des poursuites dans la présente affaire, n'a pas été modifié.

 

Enfin, parce que le principe de l'application immédiate de la loi pénale plus douce a, en la matière, pour conséquence d'affaiblir la répression des atteintes aux intérêts de l'UE et parce que les modalités selon lesquelles l'article 49 de la Charte des droits fondamentaux et l'article 4. 3 du traité sur l'Union européenne doivent être tous deux mis en œuvre paraissent incertaines, la Cour de cassation adresse à la CJUE une question préjudicielle ainsi formulée :

 

« L'article 49 de la Charte des droits fondamentaux doit-il être interprété en ce sens qu'il s'oppose à ce qu'une personne soit condamnée pour avoir obtenu des restitutions à l'exportation indues par le moyen de manœuvres ou de fausses déclarations portant sur la nature des marchandises pour lesquelles les restitutions étaient demandées, alors que, par suite d'un changement de la réglementation intervenu postérieurement aux faits, les marchandises qu'elle a effectivement exportées sont devenues éligibles à ces restitutions ? ».

 

À suivre…
 


Plus d’information dans Le Lamy transport, tome 2.
 

 


 
Source : Actualités du droit