Retour aux articles

Lettre de change : validité d'une clause de "retour sans frais" et bonne foi du banquier escompteur

Affaires - Banque et finance, Commercial
15/11/2016
Lorsqu'une clause "retour sans frais" ou "sans protêt" est préimprimée sur la lettre de change, la seule signature du tireur portée sur l'effet suffit à la valider, sans qu'il soit nécessaire qu'une seconde signature, distincte de la première, soit apposée spécifiquement sous cette clause. Dès lors, ayant relevé que l'effet de commerce accepté et signé par le tiré mentionnait en caractères imprimés : "Contre cette lettre de change stipulée sans frais, veuillez payer la somme indiquée ci-dessous à l'ordre de :", c'est exactement que la cour d'appel a retenu que la clause se trouvait validée par la signature unique du tireur, apposée, selon l'usage, au bas de la lettre de change, et en a déduit que la banque n'avait pas l'obligation de dresser un protêt, pour pouvoir exercer ses droits contre le tiré-accepteur.

En outre, c'est dans l'exercice de son pouvoir souverain d'appréciation que la cour d'appel a retenu que la banque ignorait que les matériels payés au moyen de la lettre de change n'avaient pas été livrés au moment où elle a reçu cette dernière et que sa connaissance, à cette date, de l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire à l'égard du tireur n'établissait pas sa mauvaise foi, cet état ne préjugeant en rien de la capacité d'une entreprise à exécuter ses obligations durant la période d'observation de cette procédure et n'établissant donc pas le caractère irrémédiablement compromis de sa situation. Ainsi, en en déduisant que le tiré-accepteur ne faisait pas la démonstration qu'en consentant à l'endossement du titre à son profit, la banque avait eu conscience de lui causer un dommage par l'impossibilité où elle l'aurait mise de se prévaloir, vis-à-vis du tireur, d'un moyen de défense issu de ses relations avec ce dernier, la cour d'appel a légalement justifié sa décision. Telle est la solution énoncée par la Cour de cassation dans un arrêt du 2 novembre 2016.

En l'espèce une société a, le 12 mal 2011, commandé des téléviseurs ainsi que les fixations murales correspondantes à une société et lui a versé un acompte. Le paiement d'une somme complémentaire était prévu après la livraison et l'installation complète des téléviseurs, au moyen d'une lettre de change créée le 29 mai 2011, à échéance du 31 juillet suivant. La venderesse a été mise en redressement judiciaire le 25 mai 2011. Les produits commandés n'ayant pas été livrés, l'acheteuse a demandé le rejet de la lettre de change. La banque, qui avait escompté l'effet le 6 juin 2011, l'a poursuivie en paiement. Ayant été condamnée à payer à la banque la somme de 17 940 euros, outre intérêts (CA Aix-en-Provence, 13 nov. 2014, n° 12/13489), l'acheteuse a formé un pourvoi en cassation. Mais, énonçant la solution précitée, la Haute juridiction le rejette.
Source : Actualités du droit